Un public en quête de légèreté

Média local apprécié, Fajer TV & Radio se targue d’être le « numéro un » à Tulkarem, ville du Nord-Ouest cisjordanien. Un succès fondé sur une ligne éditoriale délibérément apolitique. 

Le logo est connu, l’enseigne reconnue. A Tulkarem, Fajer a pignon sur rue. Confortablement installée au 4ème étage de son building du centre ville, l’équipe est souriante, sûre de sa valeur et de la direction qu’elle emprunte. L’ambiance est au beau fixe, les locaux savamment arrangés. Et l’environnement d’évoquer davantage un plateau hollywoodien qu’un cadre palestinien.

Al Fajer TV & Radio a endossé depuis quelque temps le statut de leader en ville de Tulkarem. C’est ce que révèlent les audiences, du moins. Ledit statut, les 25 collaborateurs le revendiquent fièrement. Ici, la jeunesse de l’équipe n’a d’égal que son dynamisme et la recette de la réussite ne fait pas l’ombre d’un doute.

En effet, Fajer a relégué la politique au second plan, bouleversant les codes et habitudes en vigueur. Prudente et avisée, la direction sait pertinemment que certains débats demeurent foncièrement clivants. Afin de déjouer le traquenard, divertissement et information locale squattent l’entier de la programmation. Ou presque. Ici, l’occupation est aux abonnés absents et la ligne éditoriale est claire : miser sur un produit drainant un public en quête d’horizons affranchis.

Par définition, Fajerl’aube en arabe – se veut précurseur. Dès lors, l’équipe a parallèlement développé son succès via les médias sociaux. Si la chaîne de télévision a été fondée il y a 20 ans, la radio n’a été inaugurée qu’en 2014, répondant à une demande ronflante sur la toile. Facebook, YouTube, Snapchat, Instagram, Twitter : aujourd’hui le groupe mise gros sur ses diverses identités en ligne, animant abondamment ses réseaux que l’on dit sociaux.

Ensuite ? Des jeunes journalistes en vogue, nombre de personnalités locales et une image « cool » que Fajer cultive au quotidien. Du style de ses studios à la musique diffusée en radio, la marée bleue-violette en ferait presque oublier la lutte dantesque opposant les jaunes du Fatah aux verts du Hamas. 

Oui, diriger un média palestinien sans faire de l’occupation son cheval de bataille, c’est possible. Cependant, n’est-il pas politique que de s’évertuer dans l’apolitisme ?

EAPPI / Tulkarem/Qalqilya / Avril 2017

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