Archives pour la catégorie South Hebron Hills

Yatta, la ville punie des terroristes de Tel Aviv

Le long de la route israélienne, deux de ces traditionnels panneaux rouges que l’on croise un peu partout en Cisjordanie et qui semblent intimider et décourager tout visiteur:

entréeareaA

«Attention, cette route mène à la zone A, sous contrôle de l’autorité palestinienne. L’entrée pour les citoyens israéliens est interdite, dangereuse pour votre vie et contre les lois israéliennes», avertissent-ils.

Entre les deux, la route de terre qui se dirige vers Yatta, dont on aperçoit au loin les habitations blanches, est bloquée par un amas de gravats.

Abed, notre chauffeur et habitant de la ville, ralentit et scrute les environs jusqu’à trouver ce qu’il cherche. Quelques mètres plus loin, on aperçoit les traces de nombreuses voitures qui se sont frayées un chemin de traverse, escaladant tant bien que mal la bordure de la route. Si la voie est bloquée, il suffit d’en faire une autre! Abed s’engage au même endroit. On patine, on recule, puis on passe le monticule récalcitrant. Après quelques secousses, on reprend le tracé de la route, ni vu ni connu. L’entrée a été forcée, une pratique courante dans ce coin désertique où les voitures peuvent se faufiler un peu partout. Mais Abed rage. «Pourquoi des milliers de personnes doivent payer pour ce que fait une seule?»

Lire la suite Yatta, la ville punie des terroristes de Tel Aviv

Publicité

Susiya, ou le calme avant la tempête

P1050936
Un buisson de thym

Autour de nous, un paysage de collines arides, dont la végétation trahit les limites toutes proches du désert du Néguev, à quelques kilomètres au sud. Des buissons qui ressemblent à des grillages, des restes de fleurs sèches aux piquants agressifs, des mottes d’herbes cassantes jaunies au soleil. Et un peu partout, des nids de thym qui projettent leur puissant arôme dans l’air environnant. Ce même thym (zatar en arabe) utilisé pour le savoureux thé si sucré consommé dans toute la région. Lire la suite Susiya, ou le calme avant la tempête

Deux femmes bédouines, une seule histoire…

Maliha a mis sa plus belle robe pour notre rencontre: elle est longue et noire avec la broderie rouge typique sur le plastron de poitrine, et une bordure argentée en bas des longues manches. Un simple voile noir recouvre sa tête, mais pas son visage avenant. Malheureusement, nous n’avons pas le droit de la prendre en photo, mais l’image de la femme digne qui est tranquillement assise en face de nous, restera encore longtemps dans nos mémoires.

Lire la suite Deux femmes bédouines, une seule histoire…

Travail syndical sous occupation – rencontre avec des syndicalistes du secteur public

Aujourd’hui, mes collègues EAs Gordon et Dag se rendent à Naplouse ; ils bravent cette pluie battante qui est une specialité de la Palestine hivernale pour un rendez-vous exceptionnel avec des responsables de syndicats des services publics, afin de se faire une idée du travail syndical dans les conditions tout à fait particulières de l’occupation israélienne.

Naplouse est d’orgine romaine, mais elle a été marquée par la conquête arabe, les croisés, les Mamelouks, les Ottomans et les Britanniques. L’histoire récente est mouvementée: depuis la partition de la Palestine en 1947, elle fait partie de la Cisjordanie. Après la Guerre des Six Jours elle est tombée sous administration israélienne, et de nombreuses colonies juives ont été fondées autour de la ville. Mais les Accords d’Oslo ont finalement attribué la ville à l’administration palestinienne en décembre 1995.

Ville industrielle, Naplouse est bouillonnante d’activités. Il y a six hôpitaux, 200.000 étudiants à l’université et quatre camps de réfugiés. La ville est entourée de 12 colonies israéliennes et de 18 outposts avec toutes les mesures de securité qui caractérisent une telle configuration.

Les 400.000 habitants de Naplouse essayent de survivre et de travailler du mieux qu’ils peuvent. Et qui dit travailler dit aussi s’organiser syndicalement, car dans toute société démocratique, les citoyens ont le droit de se réunir librement pour développer une action collective (OIT, Normes du travail).

Lire la suite Travail syndical sous occupation – rencontre avec des syndicalistes du secteur public

Firing Zone 918: démolitions très médiatiques…

Dans mon dernier article (Firing Zone 918: batailles juridiques), je relatais notre visite à Jinba au début de ce mois de février, et racontais le combat juridique et les destructions récentes. Au-delà de la situation très difficile de ce village, cet épisode a aussi soulevé des interrogations sur le rôle et les méthodes des médias.

Le 2 février, alors que nous roulons dans le 4×4 qui nous emmène sur une piste cahoteuse au sud de la «Firing Zone 918»(1), nous stoppons à Susiya où un groupe d’activistes de B’Tselem, de journalistes et de photographes nous attend. Une journaliste française nous a rejoints dans le 4×4. Elle déplie une petite carte, essaye de se repérer; visiblement, elle n’est jamais venue ici. Elle téléphone pour donner des nouvelles sur son avancement, essaye de rester ‘cool’.

Lire la suite Firing Zone 918: démolitions très médiatiques…

Firing Zone 918: batailles juridiques…

EAPPI Placement 2015«La médiation entre les villages de Masafer Yatta et l’armée israélienne a échoué», nous explique Hamed Qawasmeh dans son 4×4 blanc marqué UN qui nous emmène vers Jinba au sud de la «Firing Zone 918». «Alors ils ont profité du laps de temps avant la reprise du processus juridique pour créer des faits irréversibles sur le terrain». Hamed, d’habitude très calme, semble habité d’une sourde colère. Il dirige le bureau local des Nations unies à Hebron, OHCHR oPt (Office of the United Nations High Commissioner for Human Rights). Il nous a téléphoné très tôt, ce 2 février 2016, pour nous annoncer que des démolitions de tentes d’habitation et d’autres structures ont commencé à 5h du matin à Jinba et aux environs, et il nous a proposé de l’accompagner dans les villages concernés.

Ce qui se passe actuellement dans cette zone au sud d’Hébron est emblématique de ce qui se passe dans toute la Cisjordanie; nous essayons rapidement de nous remémorer les faits.

SHH map
Source: OCHA OPT

Lire la suite Firing Zone 918: batailles juridiques…

Welcome back, Nasser!

26 janvier 2016, 11h du matin, Yatta. Quelqu’un frappe énergiquement à la porte de notre appartement EAPPI frigorifié en raison des fortes chutes de neige. Mon collègue, trop content de cette interruption bienvenue de nos routines anti-froid fraîchement établies, s’empresse d’ouvrir la porte. C’est Nasser Nawajah, notre propriétaire, activiste des droits de l’Homme de l’organisation israélienne B’Tselem et un des leaders de la communauté villageoise de Susiya! Quelle surprise et quelle joie! Nous l’installons sans tarder auprès du feu où il accepte volontiers une tasse de thé sucré avant de se mettre à nous raconter les événements des derniers jours, en commençant avec ce qui ressemble à une « happy end » : sa libération de prison hier par le tribunal militaire d’Ofer!

P1090645
Lors de son retour à Yatta, Nasser raconte son odyssée à travers le système judiciaire israélien ©Veronika/EAPPI/2016

Son histoire se lit comme une « étude sur le système judiciaire israélien, ou plutôt sur l’occupation militaire » (http://972mag.com/israeli-police-smuggle-palestinian-suspect-out-of-the-country/116167/):

Dans la nuit du 19 au 20 janvier 2016, entre 1h et 2h du matin, le campement bédouin de Susiya est brutalement arraché au sommeil: environ 20 jeeps militaires, nombre de soldats israéliens lourdement armés et masqués envahissent le campement, éclairant les tentes de puissants projecteurs. Un frère de Nasser est réveillé le premier et harcelé par les soldats qui le prennent pour Nasser. Dès que l’erreur est manifeste, les soldats abordent Nasser, qui aurait préféré une convocation plus formelle pour se présenter à la police. Au lieu de cela, il est menotté devant sa femme, ses enfants terrorisés, aux yeux de toute la famille pour être emmené personne ne sait où.

Lire la suite Welcome back, Nasser!

Maisons démolies, espoirs détruits…Essai photo

Khirbet ar rahwa_map.jpgNous sommes mercredi, 13 janvier 2016. Il est midi à Khirbet Ar Rahwa, situé à environ 15 km au sud-ouest de Yatta, à 1 km seulement du checkpoint Meitar, frontière entre la Cisjordanie et Israël. La tente d’habitation et un abri pour les moutons de la famille de Raje Barhan Amamri viennent d’être détruits selon l’ordre du bureau de coordination du district qui administre la Zone C en Cisjordanie palestinienne au nom de l’armée israélienne.

Lire la suite Maisons démolies, espoirs détruits…Essai photo

Ta’ayush ou une étonnante action de solidarité…

Ce matin, nous partons de nouveau avec notre chauffeur dans les collines du sud d’Hébron. Après une demi-heure de voyage sur des pistes cahoteuses – il faut éviter la belle voie rapide qui est réservée aux Israéliens et prendre des chemins de terre qui la contournent – nous arrivons presqu’en haut d’une large colline pierreuse à la maigre végétation. Notre chauffeur nous pose à côté d’un petit campement palestinien et nous invite à poursuivre à pied jusqu’au lieu de rassemblement hebdomadaire en haut de la colline où nous avons rendez-vous. Il fait souvent cela: rester en retrait pour éviter tout contact avec d’éventuels soldats de l’IDF1.

Lire la suite Ta’ayush ou une étonnante action de solidarité…

Birin: une méthode particulière de réclamer des terres palestiniennes

Les colons israéliens ont développé de multiples formes pour réclamer la terre de Palestine:

  • ils la construisent

  • ils la cultivent

  • ils y récoltent ce qu’ils n’ont pas semé

  • ils l’ entourent de murs, de barbelés

  • ils la déclarent parc naturel ou terrain d’intérêt archéologique

  • ils y célèbrent des rituels religieux, comme à Birin…

Ce matin à 6h, nous partons pour Birin. Birin est un endroit tout à fait particulier non loin de Yatta, mais situé dans la «Zone C», c’est-à-dire dans la zone dans laquelle Israël exerce toute autorité, civile et militaire. Cette zone représente plus de 60% de la Cisjordanie, qui devrait devenir, avec Gaza, l’État palestinien, selon les accords d’Oslo en 1993/1994.

Birin_Map
Birin : en bleu la zone C sous contrôle israélien, en violet les colonies et en jaune la zone A sous contrôle de l’Autorité palestinienne

Lire la suite Birin: une méthode particulière de réclamer des terres palestiniennes